29/09/2014

Soleil Vert - Harry Harrison


"En cette chaude journée d'août 1999, trente-cinq millions de personnes vivent dans la cité de New-York - à quelques milliers près." Tel est le constat accablant dressé par H. Harrison en début d'ouvrage, écrit en 1966, soit plus de trente ans avant la date fatidique du nouveau millénaire évoquée dans Soleil Vert. Et c'est par cette chaude journée que l'intrigue s'ouvre...

Tout commence avec le meurtre de Mike O'Brien, parrain local et ami des politiciens corrompus, qui met sur le qui-vive Andrew Rush, policier droit dans ses bottes et exténué par des journées caniculaires trop intenses. Parallèlement, on suit Billy Chung, enfant des rues pouilleux mais désireux de ne pas finir bouffé par les rats, et ce par tous les moyens. En plus de ce tandem se greffent les très attachants Sol - vétéran collé à son vélo et ses souvenirs d'avant la pénurie - et la délicate Shirl , beauté des bas-quartiers.

Mais, au fond, l'intrigue à tendance polar basée sur les personnages sus-cités n'est qu'un prétexte utilisé par l'auteur pour envoyer un message d'alarme à son lectorat d'alors et d'aujourd'hui. En effet, le titre original Make room ! Make room ! prend tout son sens vu que la surpopulation et le non contrôle de la politique des naissances sont au cœur de cet ouvrage. (L'auteur prône ici la contraception et l'égalité homme-femme, taclant au passages les puritains américains qui nous mèneraient selon lui droit dans le mur.) Sans compter le rationnement de l'eau et de la nourriture, le dérèglement climatique, les émeutes et les maladies...

"L'heure est venue désormais, nous pouvons le voir s'approcher, nous pouvons lire les signes. Le monde n'en peut plus, il va s'écrouler sous le poids de la multitude, mais avant que ne retentissent les sept trompettes lors de ce Nouvel An, cette journée où le siècle prendra fin. Alors, et seulement alors, le jugement dernier adviendra."

Finalement, et contrairement au film, pas de révélation sidérante sur la nature du "Soylent" - qui n'est même pas évoquée - mais plutôt le "simple" récit futuriste d'un monde en déliquescence. (Je tiens à préciser que je n'avais pas encore vu l'adaptation avec Charlton Heston avant de lire ce roman et ne suis donc pas déçue par cette non-révélation.)

Bien écrit, rythmé, et globalement très actuel, Soleil Vert a toute sa place dans les classiques de la SF. Plus encore, et c'est ce qui fait sa force, il n'a pas pris une ride ! A ranger aux côtés des Monades urbaines de Silverberg.

Ils l'ont aussi lu : Lune, Julien Naufragé, Cachou, Cornwall

Critique réalisée dans le cadre du challenge Morwenna's List organisé par Cornwall

25/09/2014

La fantaisie des Dieux : Rwanda 1994 - Hippolyte & Patrick de Saint-Exupéry


En 1994, d'avril à juillet, plus de 800 000 tutsis furent traqués, exécutés, découpés à la machette et jetés pour certains dans des fosses. Un génocide de 100 jours préparé depuis longtemps. Une "folie raisonnée" que raconte Patrick de Saint-Exupéry, témoin du génocide en 94 en tant que journaliste. De retour sur le territoire rwandais, il revient sur ce qu'il a vu, ses rencontres et souvenirs.

Durant ce génocide, et c'est ce que nous montre cette BD, exit le cliché du "gentil nègre" véhiculé par Banania, voici maintenant le retour du cliché du sauvage noir (surement cannibale par ailleurs). Il est vrai que l'utilisation de Zyklon B à Auschwitz ou lors d'une exécution dans le Maryland est beaucoup plus civilisée que celle de la machette. Le sang, ça tâche. Mais le sang noir est visiblement de moindre valeur vu que : "Dans ces pays-là, un génocide, ce n'est pas trop important..." dixit F. Mitterrand en 1994. Une citation mise en exergue qui nous met tout de suite dans le bain...


Ne pas voir les milliers de corps qui s'amoncellent. Ne pas entendre les cris ni les témoignages des rescapés. Ne pas parler, taire le massacre et nier sa responsabilité.

Moment particulièrement marquant dans cette BD, la vue d'un drapeau tricolore brandi par les miliciens Hutus pour féliciter l'arrivée de l'armée française lors de l'Opération Turquoise, comme en témoigne avec dégout P. de Saint-Exupéry. Des génocidaires hilares et fiers d'énoncer le nombre de Tutsis qu'ils ont tué, persuadés que la France les aiderait à "finir le travail", devant les mines parfois déconfites de militaires. Pas très étonnant vu que dans le même temps notre armée participait l'Opération Insecticide - qui prend tout son sens quand l'on sait que les Tutsis étaient traités d'"Inienzi", de cafards - chargée de former militairement les Hutus à l'extermination. Qu'elle est belle la Françafrique.

J'ai lu un certain nombre de livres (romans, essais) sur le génocide rwandais, vu des films, mais l'effet est toujours le même. L'émotion, le choc, la culpabilité aussi. Cette BD n'y déroge pas et elle a le mérite de ne pas faire dans l'étalage de "barbarie", d'images chocs. Ici, et c'est tant mieux, le poids des mots prime sur le choc des images. A lire et à méditer.

22/09/2014

Black Mirror - Saison 2


E01 Be Right Back : Juste après s'être installés dans une maison à la campagne, Arsh - le petit ami de Martha - décède dans un accident de voiture. A ses funérailles, Martha apprend qu'une nouvelle technologie permet de parler aux défunts par l'utilisation de tout ce que la personne a pu poster sur les réseaux au cours de sa vie. Une appropriation du vocabulaire utilisé, de ses blagues ou films préférés pour ressusciter virtuellement qui l'on veut. Un défunt 3.0 qui devient de plus en plus réel au fil de l'épisode, tant pour nous que pour Martha, à la fois horrifiée et complètement addict de peur qu'il ne disparaisse une seconde fois, tout en sachant que ce n'est pas vraiment "lui". Un épisode dont le concept est troublant, effrayant de réalisme mais surtout bouleversant !

E02 White Bear : Une jeune femme se réveille dans une maison, partiellement amnésique : ne sachant ni son nom ni où elle se trouve. En allant à l'extérieur, elle se rend compte que toutes les personnes autour d'elle la filment... Une étrange épidémie de voyeurisme qui toucherait 9/10 de la planète et dont les contaminés filment constamment ce qui les entoure à la recherche de scènes scabreuses. On y comprend rien, c-à-d autant que le personnage principal, jusqu'à la fin de l'épisode qui nous cloue au canapé. Je n'en dirai pas plus !

E03 The Waldo Moment : Jim est un comédien. Personne ne le connaît en tant que tel mais son avatar, Waldo, est quant à lui suivi et adulé  par des milliers de téléspectateurs. Une popularité mal vécue par Jim puisque Waldo semble l'incarner aux yeux des autres plus que le contraire. Un manque de reconnaissance criant qui pointe du doigt l'utilisation croissante d'avatars qui nous représentent virtuellement sur les réseaux sociaux ou forums (même les blogs !). Malheureusement, cet épisode est moins abouti que ce à quoi l'on était habitué auparavant et clôt donc la saison 2 de manière décevante. Pas par manque d'idées intéressantes, bien au contraire, mais peut-être à cause d'un sujet trop vaste pour être traité de façon satisfaisante en seulement 45 minutes.

Encore une fois, Black Mirror arrive à nous surprendre par la multitude des thèmes explorés, dans des genres et ambiances différentes : passant tout autant aisément du thriller au drama, du rire aux larmes. Toujours aussi intelligent, toujours aussi sombre, toujours aussi génial malgré une légère déception sur le dernier épisode !

Souriez, vous êtes filmés !

18/09/2014

Batman : Année Un - Frank Miller & David Mazzuchelli


Après des années d'exil à l'étranger, Bruce Wayne - héritier de l'une des plus riches familles d’Amérique - est de retour à Gotham City, ville légendaire où règne la corruption et le vice. Dans le même temps, Jim Gordon débarque lui aussi dans la ville, emportant avec lui ses idéaux de justice qui ne tarderont pas à lui attirer des emmerdes.

Bâti en "miroir", le scénario met ces deux héros face à face, de telle façon que Gordon vole presque la vedette à un Batman peu expérimenté et trop sûr de lui. Heureusement pour ce dernier, après des débuts timides qui lui vaudront de belles blessures, il a appris de ses erreurs et est désormais près à combattre le crime, quitte à froisser pour cela les élites corrompues et puissantes de ma ville. Malgré tout, ces exploits lui valent aussi les faveurs et la coopération d'Harvey Dent et de Jim Gordon, incarnations de la Justice dans un océan de vermine.

Batman Année Un raconte donc en une centaine de pages la naissance d'un mythe : l'homme chauve-souris. Ou plutôt celle de plusieurs figures mythiques des comics liées à Batman : l'incorruptible Lieutenant James Gordon, Catwoman (sorte de Grace Jones avec des griffes) et même le Joker (évoqué dans les dernières planches).

Servi par un dessin superbe et des dialogues tout autant réussis, Batman Année Un s'impose de manière incontournable pour les amateurs de comics comme pour les novices souhaitant découvrir Batman à ses débuts. Une revisite du mythe délicieusement sombre et tourmentée qui donne me indéniablement envie d'en poursuivre la découverte !


15/09/2014

Un éclat de givre - Estelle Faye


"Voilà, je m'appelle Chet, j'ai vingt-trois ans, nous sommes le 6 juillet 2267. Deuxième moitié du vingt-troisième siècle. Mon siècle. Je chante le soir dans les bars. Je pense à Tess, je flirte avec des inconnus. Et au matin je vomis." C'est par ces mots-là que nous faisons la connaissance de Chet, personnage principal du roman, héros tragique et charismatique d'une mission impossible : trouver puis annihiler la source d'une drogue capable de détruire l'harmonie climatique de Paris, risquant ainsi de plonger la ville dans une canicule éternelle.

Une quête digne des plus grands écrits antiques qui poussera Chet à parcourir la ville, un Paris fantasmé et fantastique au charme désuet, allant de la Butte Montmartre aux catacombes, de l'Enfer à l'Éden. Plus qu'un décor de fond, Paris se pare ici de ses plus beaux atours et s'invite sur le devant de la scène, personnage à part entière, sorte de jumelle littéraire de la Londres de Neverwhere. Le lieu mythique d'un périple riche en aventures mais aussi en émotions, tour à tour enquête policière, Freak Show tiré de l'imagination de "Dr Maboules" et histoire d'amour tragique. Une sorte de "délicieuse pourriture" baudelairienne qui se savoure et nous envoûte.

"Personne ne peut plus prétendre, en toute honnêteté, que ma ville est la plus belle du monde. Pas "belle" au sens classique du terme, pas comme les Vénus du Néo-Louvre, ou les princesses endormies dans les contes. Je crois que je le la préfère ainsi. Même avec ses boursouflures, ses nécroses. Ses recoins morts, comme les anciens dédales du sous sol. Mais qui ne demandent qu’à reprendre vie."

A la fois glauque, poétique et mélancolique, Un éclat de givre prouve une fois de plus tout le talent d'Estelle Faye, dans un style toutefois plus mature et sombre que ne l'était Porcelaine même si l'on y retrouve quelques thèmes récurrents chers à l'auteure. Un très beau roman, vibrant d'émotion et de sensibilité.

Ils l'ont aussi lu : BlackWolf, LuneCédric JeanneretCornwall

11/09/2014

Novak et son Ai-Phone - Alain Damasio


Le 9 septembre dernier, Alain Damasio offrait en exclusivité une nouvelle inédite au site 01Net : Novak et son Ai-Phone. Découpée en quatre parties, cette nouvelle se situe à Paris, dans un futur proche où seuls les plus pauvres ne possèdent pas de Gapple Glass (Google et Apple ont dorénavant fusionné) ni d'Ai-Phone.

Complètement isolé, Novak (le POV) n'a vraisemblablement d'amis que sur Tweeter, perçoit Scarlett aka Siri comme la femme idéale, est accro aux stats que lui balance son "brightphone", n'a de mémoire que virtuelle (le Cloud est toute sa vie).... Un monde 3.0 à mon sens bien peu enviable qui fait croire à l'Homme qu'il augmente ses capacités alors qu'il nous réduit à l'état de zombie tout juste capable de penser.

"Novak voit son Ai-Phone transfiguré. Ce qui lui était si familier, si unique, si personnalisé, tellement lui, tellement sa vie, n’existe plus. Life reboot. C’est comme si on lui avait refait le visage ou qu’on avait changé ses cinq litres de sang d’une seule perfusion massive."

Un récit futuriste qui tombe à point nommé, au moment même où Apple sort son dernier iPhone et la montre connectée assortie (rassurez-vous, en plus de savoir faire une tournée de lessive et penser pour vous, elle donne l'heure !). Le récit d'un cauchemar oppressant, en réalité augmentée, qui interroge sur notre dépendance grandissante aux smartphones et autres technologies connectées par la critique de la "relation" qu'entretient Novak avec celles-ci. 

A mi-chemin entre Black Mirror et Her, c'est une nouvelle à savourer sans modération ici !

08/09/2014

Le Trône de Fer IV - G.R.R. Martin


/!\ Spoilers Inside /!\

Comme l'annonce G.R.R. Martin dans l'épilogue de cette intégrale, le choix a été fait de scinder l'intrigue en deux tomes (A Feast for Crows ici présente et A Dance with Dragons), chacun reprenant le cours des événements au même moment mais avec des points de vue différents. Un parti pris qui s'explique par la quantité de personnages et le foisonnement d'intrigues mais qui nous fait trépigner d'impatience et de frustration mêlée.

Par ailleurs, alors que l'intégrale 3 se terminait dans un bain de sang, cet opus-ci se présente plutôt comme un tome de transition, voire de mise en place. En effet, si la mort de certains personnages a entraîné la fin de leurs arcs narratifs respectifs, c'est aussi l'occasion pour d'autres personnages de faire leur entrer sur scène. Ainsi, loin de se limiter à Port Réal (bien que Cersei soit l'objet de nombreux chapitres), l'intrigue se concentre consécutivement sur la famille Greyjoy aux Îles de Fer et la famille Martell à Dorne.

Malheureusement pour nous lecteurs, le choix de l'auteur évoqué précédemment est aussi lourd de conséquences. Alors que notre coeur vibrait à chaque chapitre de Jon ou Tyrion, nos petits chouchous sont quasiment absents de cette intégrale, nous tourmentant un peu plus sur ce qu'il leur adviendra dans le futur. L'absence de Daenerys ou encore de Bran m'aura par contre été bienvenue ! Heureusement, pour rendre tout cela plus équitable, G.R.R. Martin (dans sa clémence) nous accorde quelques chapitres palpitants avec Brienne et Arya, dont la fin en forme de cliff-hanger (WTF ?!?) nous laisse pantois.

Ainsi, si cette intégrale se révèle moins haletante que les tomes précédents, elle n'en est pas moins passionnante et riche en complots. En effet, de nouveaux adversaires entrent dans le "jeu des trônes" et l'on devine que les stratégies qui commencent tout juste à se mettre en place seront d'une grande importance dans la suite : A Dance with Dragons. Et connaissant l'auteur, ça va saigner. Valar Morghulis !

Muahahaha !
Ils l'ont aussi lu : Baroona, Doris, Tigger Lilly, Vert

05/09/2014

La colline aux suicidés - James Ellroy


Ayant été déçue après la lecture d'A cause de la nuit, j'ai été soulagée de voir que James Ellroy se renouvelait, enfin, un peu. Fini les tueurs psychopathes à l'intelligence extraordinaire, les femmes fatales tombant inlassablement dans les bras d'Hopkins et le fight final qui met Lloyd en fâcheuse posture mais dont il arrive tout de même à sortir vainqueur... 

En effet, on retrouve ici Hopkins viré de la crim' de la LAPD suite au fiasco de l'affaire du voyageur de la nuit, et menacé de suspension. Il travaille désormais sur une "banale" affaire de double braquage de banque, l'épée de Damoclès au dessus de la tête. Un cas apparemment simple, tout comme ses protagonistes : de petits voyous ayant commis des vols et non plus des tueurs sanguinaires. Bien sûr, cela ne sera pas si évident et se finira tout de même en boucherie pour nos chers petits voyous ivres de folie, de jalousie ou de liberté.

"Quand on baise des putes, alors toutes les femmes commencent à ressembler à des putes. Quand on aime une femme, alors toutes les femmes commencent à lui ressembler."

La fin de sa carrière approchant avec la résolution de cette affaire, il est alors temps pour Lloyd de faire ses comptes et effacer l'ardoise où ses erreurs passées s'accumulent. Pour cela, il devra se confronter à lui-même, à ses "mauvaises" actions au service d'un idéal personnel de justice. Un face à face schizophrénique qui le poussera à commettre le pire... comme le meilleur.

"Il s'était convaincu qu'il voulait protéger l'innocence, alors qu'en réalité, il ne voulait que ramper dans les égouts en quête d'aventure ; il s'était vendu à lui-même un stock d'illusions sur la juste règle de la loi alors qu'en réalité il voulait se repaître des ténèbres qu'il prétendait mépriser, sa famille et ses femmes, jouant comme des tampons de sécurité, lorsque le noir commençait à le dévorer."

Un ultime tome des aventures d'Hopkins qui se révèle satisfaisant, bien plus que A cause de la nuit mais tout de même en-deçà de Lune Sanglante, et qui laisse espérer un futur apaisé à notre sergent préféré !

02/09/2014

Les monades urbaines - Robert Silverberg


Imaginez vous. Notre monde, dans plusieurs centaines d'années. 70 milliards de personnes, vivant sur approximativement 20 % de la surface terrestre quand les 80 % restants sont alloués à l'agriculture. Pour réussir à "stocker" tant de monde dans un espace si restreint, notre société future a du faire table rase du passé, au sens propre, détruisant tout sur son passage pour rendre possible la construction de monades, gratte-ciels de près de 3 kilomètres, véritables métropoles s'étalant à la verticale.

"Sur sa gauche, il voit la face occidentale de Monade 115, toujours dans l'obscurité. A sa droite, les fenêtres orientales de Monade 117 scintillent. D'où il est, lui apparaissent d'autres monades alignées en une longue file s'étirent contre l'horizon. Toutes identiques. Ce sont des tours gracieusement effilées, hautes de trois mille mètres, en béton précontraint. C'est une vision saisissante. Dieu soit loué s'exalte-t-il."

Mais comment une vie agréable et en communauté  est-elle possible dans un espace clos, quand bien même celui-ci est immensément grand ? Utopie ou folie ? C'est à ces questions que répond, il me semble, Robert Silverberg dans cette anticipation. Car malgré un bien-être apparent et une propagande prônant l'évitement de toute source de tension et la recherche du bonheur/plaisir, les différents personnages que l'on suit dans ce roman sont sujet à des remises en question : de leur mode de vie fermé et vertical et des comportements/attitudes que l'on attend d'eux.

Ils font ainsi preuve d'un libre-arbitre et d'une volonté de se libérer du carcan d'une société en fin de compte totalitaire. A leurs risques et périls, comme l'expérimenteront certains, vu que les déviants - appelés "anormo" - sont condamnés à "dévaler la chute" et servir ainsi de combustible, nécessaire à la production énergétique de chaque monade. Dans une moindre mesure, si notre comportement anormal n'est pas trop inquiétant, une petite lobotomie à base de dosage hormonal nous remet dans le droit chemin.

"Le refus de toute frustration est la règle de base dans une société telle que la nôtre, où les frictions les plus minimes peuvent conduire à d'incontrôlables oscillations discordantes."

Après une telle lecture, difficile de se dire qu'il y a 40 ans un homme ait pu avoir des idées aussi visionnaires sur l'évolution de nos technologies (si non de notre société et heureusement ! (en tout cas pour l'instant)). Intelligent, tant sur le fond que la forme, mais aussi bourré d'humour (surtout au début) je comprends maintenant pourquoi ses Monades urbaines sont considérées comme un chef d'œuvre de la SF. Un intemporel à découvrir impérativement !

Critique réalisée dans le cadre du challenge Morwenna's List organisé par Cornwall
http://laprophetiedesanes.blogspot.fr/p/les-niveaux-sont-en-fonction-du-nombres.html